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10 juillet 2016
Laura Orsal

Le triathlon pour les nuls

« There’s two kinds of people in this world, there’s winners and there’s losers. You know what the difference is ? Winners don’t give up. »

Se présenter sur une épreuve qualificative pour la coupe de France de Triathlon par équipe quand on n’a pas d’abdos visibles, pas de tatouage dans le creux des reins, pas de vélo de contre-la-montre et la peau toute blanche, c’est toujours déprimant :
1/ Les chances de ne pas performer sont très élevées ;
2/ Les chances de ne pas se faire draguer sont (très) très élevées.

C’est l’arrivée dans le parc à vélo le moment le plus impressionnant – défilé de biceps, triceps, quadriceps, etc. On (Camille et Laura) fait la queue entre un Specialized et un Scott. On arrive devant les arbitres les cheveux ébouriffés, le casque de travers et la lanière pas attachée (f**). L’arbitre nous regarde et nous demande : « Et votre numéro de dossard sur le casque ? » On se regarde, on regarde les autres triathlètes : ils ont tous leur numéro collé sur le devant du casque. Pas nous.
- "Euh… on l’a oublié.
- Vous pouvez pas rentrer si vous l’avez pas. Il est dans le sac qu’on vous a donné lors du retrait des dossards.
- C’est que… on a laissé le sac dans une voiture, et cette voiture est repartie."
- Ben vous pouvez pas rentrer.
Têtes dépitées.
Bon, demandez à l’arbitre principal (qui est juste derrière).
- Bonjour Monsieur, on a eu un début de matinée difficile et on a complètement oublié de coller notre numéro de dossard sur notre casque. Est-ce qu’on peut quand même faire la course ? Vous inquiétez pas, on a aucune chance d’être sur le podium…
- Allez-y."
Sourire de soulagement.

On installe nos vélos à leur place, on positionne soigneusement notre serviette sur laquelle on met nos chaussures de vélo, une paire de chaussettes et un gel coup de fouet. On commence à enfiler notre combinaison. Sophie (3e équipière) nous dit : « N’oubliez pas de mettre votre puce, les filles ! »
La puce…
La puce ?!!!!
On a oublié nos puces (dans le sac, qui est dans la voiture, qui est repartie).
Têtes vraiment très dépitées.
"On fait quoi ? On court quand même ?
- Oui, tant pis, on sera pas classées."

Les filles de l’ACBB Triathlon à l’épreuve des Mureaux

Sophie met son bonnet noir et vert Les Mureaux. Il est beau cette année. Il y a même un petit dinosaure. Merde…
Le bonnet…
On l’a oublié (dans le sac…).
Sophie craque : « Putain, les filles… !!! »
Camille est toute excusée, c’est son premier tri.
Je m’excuse mille fois : « Je suis vraiment désolée, j’ai la tête ailleurs. » (x1000)

Pour être plus précise, j’ai la tête à 20 minutes en voiture de la base de loisirs, dans un parking fermé par une immense grille où on a laissé notre capitaine d’équipe Caroline.
Ça fait des mois qu’on parle de faire ce triathlon. C’est Caro qui a tout organisé, de la formation de l’équipe aux inscriptions. On était gonflées à bloc, prêtes à lutter pour l’avant-avant-dernière place. On a même dormi chez notre coach mental-soigneur Nancy pour être plus près des Mureaux le dimanche matin. Comprendre « soirée pâtes-pyjama entre filles ».

Réveil à 7h le dimanche matin. On charge les deux voitures (sacs + vélos) à 7h45. On est prêtes à décoller à 7h53 et on n’a rien oublié. Démarrage des voitures à 7h54. On se dirige vers la grille pour sortir du parking. Attente d’ouverture de la grille. 7h55. Caro descend de sa voiture, frappe à la vitre de Nancy. "J’ai crevé.
- T’as une chambre à air ?
- C’est la voiture qui a crevé.
- Ah…
- On a plus qu’à mettre la roue de secours.
- J’ai pas de roue de secours.
- Aahh !!"

Tout ce qui suit s’est malheureusement vraiment passé :
5 filles accroupies près du pneu crevé...
...en train de 1/ visser le câble reliant la bonbonne de gonflage de secours à la valve du pneu ; 2/ visser la bonbonne à la batterie du kit de secours ; 3/ démarrer la voiture

Explosion de la bonbonne mal vissée.

Il est 8h10. On a 20 minutes de voiture pour y aller. Le parc à vélo ferme à 9h15.

On panique.

A 8h13, Caro prend une décision : « Allez-y sans moi. » (Pour bien comprendre la situation, on a 5 personnes, 4 vélos et 4 gros sacs à faire rentrer dans une voiture = impossible.) On s’apprête donc à faire la course sans notre capitaine. (C’est un peu comme si vous organisiez une soirée ciné en amoureux et que votre chéri(e) ne venait pas au dernier moment, mais que vous y alliez quand même… ça n’a aucun intérêt et c’est triste.)

Départ course à pied au triathlon des Mureaux 2015

On arrive dans l’eau dans cet état d’esprit, sans notre capitaine, sans nos puces, mais avec trois beaux bonnets dinosaure (on a finalement réussi à en récupérer deux). L’arbitre siffle et nous voilà parties !

La natation se déroule très bien. Sophie et moi devant, Camille au milieu. L’eau est à 16°C mais on ne sent pas le froid. Le parcours se fait en losange, avec le soleil dans les lunettes au retour et un cygne qui traverse notre trajectoire. Belle transition. On part en vélo avec une stratégie déjà établie : Sophie et Camille prennent les relais, moi je suis. Parcours très roulant avec quelques relances nécessaires après les virages et les ronds-points. On se fait doubler par quelques équipes. Magnifique soleil et encouragements chaleureux des bénévoles. Re-belle transition. Départ pour la course à pied. On se fait doubler par 2-3 équipes mais on tient notre rythme avec des accélérations et un beau finish à trois sur la ligne d’arrivée.

Le meilleur moment de la course : en haut de la dernière côte de la course à pied, on entend deux personnes crier : « Allez les filles !! »

C’était Nancy et Caro.