Vendredi 26 avril, je me rends gare Montparnasse pour prendre un train en direction de Quimperlé puis Le Pouldu.
J’arrive en début d’après-midi, dépose mon sac et file direction la prise de dossard. Là, je rencontre des coureurs qui ont couru l’année dernière et m’annoncent la difficulté du parcours. Je commence à prendre conscience du challenge que je me suis lancé.
Après un repas plutôt costaud à base de spaghetti bolognaise, direction la chambre avec une pression qui ne cesse de grandir.
Réveil à 2 heures du matin et petit déj express. Le car nous attend pour nous mener à la ligne de départ, sur le site de Quelven en Guern.
5 heures, départ à la frontale. Ça part très fort devant. Je suis motivé mais décide quand même de lever le pied n’ayant jamais parcouru une telle distance, d’autant plus que nous commençons par un fort dénivelé positif.
Les kilomètres défilent. J’avance tranquillement, bien dans mes chaussures.
Le soleil se lève, nous traversons de petits villages très sympas. Je prends le temps de regarder, je profite.
Kilomètre 26, premier ravito solide. Je prends un verre de coca, un bout de fromage et du jambon que j’avale péniblement. Il fait bon. Le soleil est bien là. C’est le moment de passer en manches courtes. Un gel café et on y retourne. On s’enfonce à présent dans une forêt où le dénivelé est de plus en plus fort. Direction Plouay au km 51 affiché.
Mon tibia droit commence à tirer, séquelle de l’écotrail de Paris (80km) un mois plus tôt.
Les kilomètres défilent et en arrivant à Plouay, km 56 d’après ma Garmin pour 52 annoncé... La route me semble interminable. La grêle commence à tomber (oui oui, de la grêle). Mais où est ce ravito. Le moral commence à baisser, pour moi comme pour tous les coureurs que je croise. On continue, encore et encore. De plus en plus de bénévoles, c’est bon signe. Ils nous guident jusqu’à la salle, enfin...
Le coup de mou est là et bien là. Je rencontre Patricia, une bénévole qui voit mon état, et m’apporte une soupe. On discute un peu. Elle connaît le parcours. Elle me conseille et me rassure, une vraie mère. Merci encore à elle qui a su trouver les mots. Allez, décollage, reboosté. En repartant je croise des pompiers. Tiens, ils doivent avoir une bombe de froid, un bon coup sur le tibia et ça repart de plus belle.
Là, je rencontre Jean-Marie qui comme moi a des jambes de bois, on dirait deux pingouins sur une banquise. C’est ridicule mais très drôle ! On se remet en marche tranquillement jusqu’à prendre notre vitesse de croisière. Là on s’éclate, le soleil est revenu, il y a du dénivelé, on grimpe, on relance, le terrain est génial, ça redescend, remonte, relance, descente... c’est casse patte, et on commence à ralentir.
On attaque les roches du diable, c’est splendide. Mais toutes les racines apparentes et les silex commencent à faire souffrir les pieds. Mais que c’est beau.
Avec Jean-Marie, on fait connaissance, un mec sympa. On approche de quimperlé, ça sent bon les 100 km. Et on y arrive, aux 100 km... quelle joie ! On a l’impression de passer le cap Horn. Pour lui aussi c’est une première, grosse émotion partagée.
Nous voici maintenant rentrés dans la famille des 100 bornard. On arrive au ravito, en théorie, il nous reste à peine 15 à 20 km. Sauf que depuis quelque temps, les barrières horaires sont décalées de 6 à 7 kilomètres. Du coup, à combien sommes nous de l’arrivée ?
On repart, mais on sort les frontales. Là c’est l’enfer sur terre, j’ai les pieds en feu et il m’est presque impossible de repartir en foulée, le moindre cailloux me fait un mal de chien, à ce demander si je ne cours pas pieds nus sur du verre pilé. Si proche du but, l’abandon n’est même pas envisageable, Jean-Marie me motive, et j’y arrive.
Ça grimpe, ça grimpe. Le dénivelé est encore plus dur, c’est sans fin. Je passe devant JM qui lutte un peu en montée, je l’accroche, il s’accroche. On déroule tant bien que mal...
En revanche, les descentes sont pour moi une toute autre affaire. Je ne sens pas mes appuis. Je suis obligé de marcher, impossible de descendre. Les pierres et racines auront eu raison de mes voûtes plantaires. Il nous reste 6 km d’après nos estimations. On décide de repartir en trottant... Mais non, ça ne veux plus. Alors on marche les 6 derniers, mais en marche rapide. Nous rattrapons d’autres coureurs qui sont dans le même état, on rit de nos états respectifs, ça vanne gentiment.
Au loin, la lumière de l’arrivée, la musique... on y est, on termine les quelques mètres qui nous séparent de la ligne en trottant, en boutant, on la franchit dans un moment d’euphorie.
Quelle joie, au final, 121 km, 19h40 de course, où je suis passé de la joie au moral dans les chaussettes, du bien-être à des douleurs comme jamais, mais c’est fait...
J’arrive sous la tente sous les applaudissements des bénévoles et je retrouve Patricia qui m’accueille. Quel bonheur, une tête connue... Vu l’heure tardive, je m’attable avec les organisateurs et bénévoles pour le dîner d’après course.
Une d’elle me ramènera même à mon hôtel après. Ils sont vraiment sympa les bénévoles bretons.
Je rentre dans ma chambre, ivre de joie d’avoir terminé ma course, d’avoir été jusqu’au bout même si je termine dans les 10 derniers arrivants. Position finale : 126e sur 200 avec un taux d’abandon de 31%.
Une chose est sûr, les courses à 3 chiffres, j’y retournerai !
Voir en ligne : Bretagne Ultra Trail
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